Phonorama, le site dédié aux phonographes à cylindres

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Phonographes à feuille d'étain [Page 4/4]


Ce petit phonographe à feuille d'étain de la période 1880-1882 dispose d'un mandrin en laiton, d'un cornet en bois fruitier et d'une base en fonte peinte en noir ornée de filets dorés. Sur d'autres exemplaires similaires, les filets sont rouges.
Sur le mandrin, une fente taillée parallèlement à l'axe afin de recevoir les extrémités de la feuille d'étain. Une fois enroulée et plaquée, cette dernière sera maintenue grâce à une fine baguette de bois insérée dans la fente.
Sans qu'il soit possible à ce jour de déterminer le rôle de chacun,  il y a tout lieu de penser que le constructeur de ce petit tinfoil est l'un des deux ingénieurs Achille Loiseau ou Léonce de Combettes (voir ci-après). Il faut pour s'en convaincre se reporter au témoignage de Théodose Du Moncel, ardent défenseur du phonographe lors de son introduction en France. Dans Le Microphone , le radiophone et le phonographe, paru en 1882, le comte fait en effet état de phonographes de petites dimensions vendus bon marché (20 francs) par MM. Loiseau et de Combettes.


Peu après la présentation du premier phonographe de Thomas Edison en 1878, à l'image du Scientific American aux Etats Unis ou de La Nature en France, les revues de vulgarisation scientifique publiaient des gravures et des plans détaillés de l'invention. La possibilité de construire leur propre phonographe s'offrait alors  aux lecteurs férus de nouveautés et habiles de leurs mains.
Ce tinfoil est un exemple de ce type de réalisation par un amateur qui l'a construit en grande partie en bois exotique, à l'exception du mandrin en laiton et de son axe en fer. Le phonographe se caractérise par un cornet surdimensionné, le diamètre du diaphragme mesurant 8 cm. A l'aide d'un rail sur lequel il coulisse, le support du cornet permet d'ajuster la distance entre la pointe et la feuille d'étain.
Le constructeur a doté le diaphragme d'un perfectionnement original visant à améliorer sa sonorité : le diaphragme constitué d'une fine plaque de fer est progressivement tendu lorsque le cornet est vissé sur son support, grâce à une bague intermédiaire. Un dispositif similaire sera adopté plus tard par Bettini dans ses reproducteurs.



Construit en laiton sur une  base en acajou, ce tinfoil de petite taille est d'origine britannique. Son mandrin de 10 cm de diamètre présente une fente longitudinale, dans laquelle s'insère une fine baguette de bois permettant de fixer la feuille d'étain.
Ses caractéristiques de fabrication et l'absence de marque ou de numéro de série indiquent une construction tardive en faible nombre. Le phonographe était vraisemblablement destiné à un usage didactique pour une école disposant d'un laboratoire de physique.
 



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A voir aussi

  • Les inventeurs Achille Loiseau et Léonce de Combettes

Avant l'invention du phonographe, les ingénieurs Camille Loiseau et Léonce de Combettes s'étaient particulièrement consacrés à la construction de jouets électriques et de matériels pour la vulgarisation scientifique dans les écoles et dans les familles. Leur expérience dans ce domaine, ainsi que leur participation à des expositions entre 1878 et 1881 les ont naturellement conduits a s'intéresser à cette découverte; ils vont construire et commercialiser un petit phonographe très simple, adapté aux besoins des enfants.

Achille Loiseau, opticien et fabricant d'appareils scientifiques, fut le premier, en 1863, à appliquer la télégraphie aux jouets. Il se spécialisa dans la construction de jouets électriques, scientifiques et instructifs. Dans son catalogue de 1870, figurent des petits télégraphes, des bobines de Rhumkorff, des tubes de Geissler ou des moteurs électriques bon marché, destinés à donner aux enfants le désir d'approfondir la science.

 

Léonce de Combettes, Ingénieur civil originaire de Lyon, a déposé de nombreux brevets, pour la plupart relatifs à la télégraphie. Sa société créée en 1877 commercialisera, comme celle de son collègue Achille Loiseau, des appareils scientifiques appliqués à l'enseignement.
Parmi ses curieuses inventions, figurent une montre solaire perpétuelle et un énigmatique Adophone, un cahier chantant dont les pages constituées de feuilles  d'étain  et de  papier intercalé faisaient entendre des sons musicaux.

Publicité de Léonce De Combettes (1882)

 

En  janvier 1878, il  présenta  cette invention  au

 

Musée Polyphonique où la Société des Inventeurs expérimentait chaque jour ''les instruments et appareils se rapportant, de près ou de loin, au microphone, au téléphone et au phonographe''.
Toujours dans ce domaine, l'ingénieur imagina en 1886 un phonographe électrique qui demeura regrettablement au stade de prototype.

 
  • Joseph Nigra et l'introduction du phonographe en Italie

C'est à Joseph Nigra que l'on doit les premières démonstrations du phonographe en Italie. En 1878, il est représentant pour son pays du «professeur Edison» et  directeur de la revue de vulgarisation scientifique Il propagatore delle invenzioni (Le propagateur des inventions), dans laquelle il fait une large place aux inventions du savant américain.

 

Durant l’été 1878, dans sa ville Turin, puis l’année suivante dans toute l’Italie, le professeur Joseph Nigra  fait connaitre les nouveautés scientifiques : la plume électrique, le microphone, le condensateur chantant et bien sûr, le phonographe. Ses nombreuses conférences sont suivies de démonstrations de la dernière invention d'Edison dont l’achat est proposé aux spectateurs médusés.
On peut lire dans La Gazzetta Piemontese du 10 septembre 1878, qu'à Venise, l'ingénieur turinois vient d'organiser pour le Prince de Naples âgé de dix ans et sa mère Marguerite de Savoie, une séance durant laquelle il a enregistré la voix de la reine sur une feuille d'étain; conquise par l’expérience réussie, elle a fait l’acquisition du phonographe.
Quand l'intarissable professeur débarque à Naples le 26 avril 1879, c’est pour donner sa deux cent vingt-deuxième conférence! Ce jour là, grâce à la sténographie, l’organisateur Enrico Bottazzi recueille ses propos qu'il va s'empresser de publier sous la forme d’une brochure intitulée Conferenza  seguita da esperimenti sul fonografo, penna elettrica,microfono, microtelefono, sonda microtelefonica, condensatore cantante ed accenditore elettrico dont on voit la couverture ci-contre.

Conférence de Joseph Nigra
sur le phonographe (1879)

 

Toujours à Turin, le Studio Tecnico Volta, créé par Joseph Nigra en 1880 se spécialise dans les appareils scientifiques et électriques, il vend notamment des téléphones qu’il a conçus et brevetés. Le catalogue du Studio Technique Volta décline, sans en nommer le constructeur, la gamme des phonographes d'Urbain Fondain : les modèles à main et à mouvement d’horlogerie, ainsi que le tinfoil d’écolier.
 

 

Tinfoil de Joseph Nigra (1880)      

En 1881, le professeur Nigra poursuit toujours ses conférences à Turin, où il présente maintenant un nouveau phonographe issu de sa propre construction. La Gazetta Piemontese du 15 février 1881 rapporte qu'il a enregistré avec sa dernière création un morceau de la Traviata de Giuseppe Verdi, joué au piano chez le savant turinois Michele Lessona.
Un exemplaire du tinfoil de Joseph Nigra est conservé à l’Istituto Centrale per i Beni Sonori ed Audiovisivi à Rome. L'appareil présente des analogies avec celui de Fondain; il s'en différencie par son volant d'inertie. Sur le socle noir orné de filets dorés, on distingue la plaque en laiton du Studio Tecnico Volta à Turin.

 

Parallèlement à son engagement pour la vulgarisation du phonographe en Italie, le professeur Nigra se fait connaître par ses expériences et ses réalisations menées avec le concours du Studio Tecnico Volta. L'un de ses premiers brevets, déposé en 1884, portait sur une voiture électrique atteignant la vitesse de 20 Km/h, d'autres sur ses inventions dans le domaine de la téléphonie ou sur la combinaison du télégraphe avec le phonographe.

 

Outre le professeur Nigra, un personnage singulier s'est très tôt intéressé au développement du phonographe. Il s'agit du peintre Andréa Fossati; sa première création fût un tinfoil miniature dont la longueur du mandrin n'excédait pas 53 mm. Par la suite, en 1891, Andréa Fossati s'employa avec succès à simplifier et à réduire la taille et le prix du phonographe électrique d'Edison. 
Dans un article du magazine Il mondo de juillet  2007 nous découvrons que "contrairement aux idées reçues, le premier phonographe n'a pas été inventé par Edison en 1877, mais par un peintre-scientifique de Brescia, Andrea Fossati , qui a présenté son prototype en 1876" ! On ne prête qu'aux riches..

Tinfoil d'Andréa Fossati (vers 1880)